« Madame la Présidente, Madame la Vice-Présidente déléguée à l’action sociale, à la PMI et à la Santé,

Je souhaite vous proposer de développer une « maison de l’enfant et de la famille » dans notre territoire.

En effet, l’article 33 de la loi du 7 février 2022 relative à la protection de l’enfance a créé à titre expérimental et pour une durée de trois ans, dans les départements volontaires, une structure dénommée “maison de l’enfant et de la famille“.

Le projet a pour ambition d’expérimenter un service en charge d’assurer l’animation territoriale autour de la santé des enfants de 3 à 11 ans et, à partir de l’évaluation des besoins de santé globale, la mise en place – pour les enfants en ayant le plus besoin (notamment en raison d’un éloignement du système de santé ou d’une situation de santé complexe) et en appui aux professionnels du premier recours (médecin généraliste notamment), d’un parcours de santé afin d’améliorer sa prise en charge et son suivi pluridisciplinaire en proximité.

Le projet “Maison de l’enfant et de la famille“, expérimenté dans le cadre du dispositif de l’article 51 de la loi de financement de la Sécurité sociale 2018, vient d’être validé par le comité technique de l’innovation en santé (CTIS). L’arrêté en fixant le cahier des charges est actuellement en cours de signature, pour une publication d’ici la fin du mois.

Trois territoires ont d’ores et déjà montré leurs intérêts auprès de l’Etat pour cette expérimentation : les départements du Rhône et de la Vienne, ainsi que le territoire de la collectivité de Corse. Cette expérimentation prendra fin en septembre 2026.

Dans le Lunévillois, de nombreux enfants auraient besoin d’un accompagnement par des professionnels de santé (orthophonistes, pédopsychiatres, psychologues, psychomotriciens, etc.) pour réaliser dans de meilleurs délais tout d’abord un bilan, puis assurer un suivi adapté pour leur développement. Certains territoires au sein du Lunévillois ne semblent pas suffisamment couverts par des CMPP et des CAMPS. Ceux déjà existants avec les moyens alloués par l’Agence Régionale de Santé ne peuvent plus accueillir davantage d’enfants en difficulté et les délais d’attente avant un premier rendez-vous apparaissent très longs.

La “Maison de l’enfant et des familles“ pourrait être une solution appropriée pour ces enfants en attente d’accompagnement. Cette expérimentation pourrait se développer en lien avec une association telle que les PEP Lor’Est gérant déjà notamment le centre médico-psycho pédagogique de Lunéville-Baccarat et une commune volontaire aux besoins avérés à la suite d’un diagnostic social partagé, Madame la Présidente, Madame la Vice-Présidente, pourriez-vous étudier la pertinence d’envisager une telle candidature pour tester nous-aussi ce dispositif en Meurthe-et-Moselle, un département qui a toujours été pionnier en termes d’innovation sociale ? »

Réponse de Mme Rosemary LUPO, Vice-Président déléguée à l’Action sociale, à la PMI et à la Santé :

« Cher collègue, Cher Thibault,

En effet, la loi TAQUET de février 2022 offre la possibilité d’expérimenter une maison de l’enfant et de la famille visant à améliorer la prise en charge des enfants et des jeunes grâce à une meilleure coordination des professionnels qui gravitent autour d’eux.

Cette maison participerait notamment à l’amélioration de l’accès aux soins, l’organisation du parcours de soins, développement des actions de prévention, promotion de la santé, de soutien à la parentalité, ainsi qu’à l’accompagnement et à la formation des professionnels en contact avec les enfants et leurs familles. Autant de missions en résonance avec celles de la protection maternelle et infantile et de ses partenaires dans le champ sanitaire et de la santé sexuelle, que du soutien à la parentalité plus largement des parties prenantes du contrat local de santé et celui du lunévillois est particulièrement dynamique.

Les bilans en école maternelle, les consultations petite-enfance, les lieux d’éveil portés en lien avec nos partenaires, ainsi que le large panel des visites à domicile menées par la PMI, constituent déjà des outils clés de prévention en santé des enfants que nous souhaitons bien évidemment encore renforcés. Tout comme l’accompagnement des familles dans la construction des premiers liens avec l’enfant sont des leviers de luttes précoces contre les retards de développement. Et, c’est sans parler de l’activité de nos centres de santé sexuelle qui bénéficient à près de 8200 personnes chaque année, soit en consultation, soit en entretien. Près d’un tiers sont des mineurs et l’immense majorité sont des jeunes femmes. Dans ce domaine également le territoire du lunévillois est très dynamique notamment en raison de l’engagement du service de santé sexuelle du centre hospitalier de Lunéville, et je tiens ici à remercier son chef de service le docteur Doerper.

C’est en cohérence et en complémentarité avec l’ensemble de ces acteurs, actions et dispositifs et en évitant les effets d’empilement, évidemment, le cahier des charges est en construction, qu’une maison de l’enfant et de la famille pourrait effectivement trouver sa place dans le territoire lunévillois.

Mais, un tel service doit pouvoir démontrer sa pertinence et répondre à des besoins non satisfaits du territoire. Dit autrement, si la coordination aujourd’hui peut sembler satisfaisante, indépendant d’un lien fédérateur. L’opportunité d’une telle maison ne sera pas avérée. Il faut que les deux soient convergents.

C’est pour l’ensemble de ces raisons, qu’en lien avec Marie-José AMAH, nous avons demandé à l’administration départementale de réfléchir au déploiement d’un tel service de coordination et d’envisager dans le lunévillois, comme territoire d’expérimentation.

Sous la responsabilité de la direction générale des solidarités seront ainsi sollicitées la direction enfance-famille, la PMI, mais aussi la mission santé et la direction territoires, voire l’ARS.

Sur la base de cette expertise sanitaire et médico-sociale, et sur la base des premiers éléments que tu as donnés tout à l’heure sur ce territoire particulièrement, nous te proposons un temps d’échanges, par exemple en commission solidarités pour pouvoir vérifier les éléments et l’opportunité ensemble de la faisabilité d’une telle maison. Je te propose de nous fixer l’échéance de l’automne prochain pour procéder à un examen de recommandations de nos services. L’arbitrage appartiendra à l’exécutif départemental bien évidemment.

Pour conclure, tu me permets aussi d’évoquer la question du suivi sanitaires de 0-18 ans dans un angle plus large. D’ailleurs, aborder par le projet départemental, une approche qui me semble d’autant plus ambitieuse pour le suivi sanitaire des enfants et des adolescents que les dispositions de la loi TAQUET sur les maisons de l’enfant et de la famille. Allons donc un petit peu plus loin, dans le cadre d’une réforme nécessairement nationale, ne serait-il pas tant de songer à la création d’un service public de la prévention de la santé et du bien-être de l’enfant et de l’adolescent ? Il s’agirait évidemment de remettre la médecine scolaire à l’honneur et de la revitaliser. Les départements, forts de leur compétence en PMI seraient légitimes pour mener ce travail et piloter ainsi la santé de nos enfants et de nos adolescents d’avant leur naissance jusqu’à leurs 18 ans.

Oui, il s’agit d’un transfert de compétences qui ne serait acceptable qu’à la condition que l’État, qui nous a privés de notre autonomie fiscale, transfert aux départements des ressources à hauteur des besoins et par conséquent qui ne peut pas se faire à budget constant, comme il a l’habitude de le faire.

Au regard de la dégradation, voire de la disparition de ce service rendu, l’important n’est-il pas, comme la rappeler la présidente dans son discours introductif, pour qui ? pour nos jeunes dont nos collégiens, pour une continuité de service public en santé, aujourd’hui, la médecine scolaire est un service public volontairement tari et abandonné par l’État. Pour autant, c’est un service qui se doit de revenir dans l’action, outil également de prévention essentielle en direction de nos jeunes, de leur santé, tout au long de leur vie. »